UN MONDE... DES MONDES
MEETING EUROPEÉN A VENICE LE 12-13-14 SEPTEMBRE 1997

 

Le 14 septembre prochain à Venise, le parti de la ''Lega Nord'' a décidé d’organiser la célébration de la naissance d’un nouvel Etat national, au sein de l’Italie septentrionale, la Padanie.

C’est seulement le dernier acte chronologique d’un processus social et politique qui a vu croître dans ces derniers mois et dans l’ensemble des régions du Nord de l’Italie, en particulier dans le Nord-Est, une culture et une pratique diffuse du "sécessionisme" : à savoir un projet politique s’affirmant de jour en jour, pouvant compter sur un consensus de masse, porteur de contenus exprimant clairement intollérance et racisme. Son objectif est la naissance d’un nouveau "micro-nationalisme", fondé à la fois sur "l’identité ethnique padanienne", sur de féroces politiques économiques néo-libérales et sur l’accroissement et l’intensification des processus d’exclusion sociale sur base raciale.

Ils veulent un nouvel Etat en Europe, raciste et autoritaire, comme si nous n’avions pas assez de ceux déjà existants, comme si la tragédie des peuples de l’ex-Yougoslavie n’avait pas servi de leçon, si besoin était!

Le "micronationalisme padanien" est un des fruits empoisonnés que les grandes transformations productives et sociales de ces vingt-cint dernières années, la formation d’un marché mondial guidé par les politiques néo-libérales et le nouveau rapport qui s’est instauré au sein de ce dernier entre "global" et "local" nous ont consigné.

La lutte sans quartiers contre les dérives barbares et la désagrégation que cette situation nous laisse entrevoir est un des bancs d’essai sur lesquels doivent se mesurer tous les sujets engagés dans la recherche et la construction de nouveaux parcours de libération, pour un monde à la mesure des femmes et des hommes, plus libre et plus juste.

Les trois journées de septembre à Venise sont l’occasion de démontrer une claire et nette opposition, sur le terrain du conflit ouvert et de masse, à toute hypothèse sécessionniste et raciste, avec l’ouverture d’un espace permettant une vraie rencontre , non formelle, avec toutes les expériences sociales et politiques qui se confrontent aux nouvelles contradictions actuelles et qui sentent le désir d’expérimenter de nouvelles voies de l’agir politique et de nouveaux horizons de la transformation sociale. Nous invitons tous à une ample discussion qui nous permette de repenser l’action politique antagoniste pour une nouvelle charte des droits, s’insérant dans le rapport "global" et "local".

Pour la première fois dans l’histoire, en fait, le "monde" se présente effectivement ainsi : évènements et situations, dans des lieux les plus loins et des territoires les plus diverses, se présentent et se connectent à l’intérieur d’une seule et grande scène, le marché mondial.

La "globalisation" avance, avec une force explosive et impétueuse: elle détruit les vieilles relations et racines, subvertit et transforme littéralement les modèles de vie, de production, de reproduction, de consommation..., tout en redessinant territoires et appartenances, et en créant nouvelles frontières et descriminations...
Elle construit de nouveaux privilèges, de nouvelles hierarchies et injustices en tous points de la planète: rien n’échappe à cette puissante "machine" qui a la même force que l’accumulation originelle!
La globalisation se fait à l’enseigne du triomphe du capitalisme, du marché, de la "violence de la monnaie" : tout autre alternative semble disparue de la scène de l’histoire.

La "pensée unique", celle du marché global, ce nouveau monstre totalitaire et l’ "exploitation de l’homme par l’homme" semblent un destin inéluctable, pratiquement comme s’il s’agissait de lois naturelles.

"L’Histoire est finie... !" s’empressent à dire quelques tristes apologistes du nouvel ordre mondial (et si vraiment il en était ainsi, rien de pire ne pourrait exister!).

Nous au contraire, nous croyons que l’Histoire n’est pas finie.
Il existe toujours une possibilité, une alternative, une utopie, une espérance : il faut savoir saisir et comprendre son propre temps, sa propre période historique ! Aujourd’hui il est juste, possible et nécessaire de se rebeller contre l’ordre néo-libéral, contre la globalisation de l’exploitation et de l’oppression, à partir de nos territoires, des lieux où nous vivons et luttons. A partir de nos villes et pays... Comme l’enseigne le Chiapas, en maintenant le lien indissociable entre "local" et "global".

NÉO-LIBÉRALISME, DESPOTISME ET ABOLUTISME : COMBATTRE ENCORE UNE FOIS, POUR LA LIBERTÉ

Au travers de la crise profonde et irreversible de l’Etat providence-national, la globalisation néo-libérale et la domination par le marché capitaliste peuvent être aggressées seulement à ce niveau de la contradiction.

Il est nécessaire:

Une nouvelle Histoire peut s’engager: elle parle un langage nouveau, simple et originel, à savoir la justice et la liberté pour les exploités, les oppressés, les plus faibles..., la démocratie réelle et un nouvel espace public, la création de communautés solidaires et coopérantes.

CONTRE LES FORMES MODERNES DE L’ABSOLUTISME ET DU DESPOTISME POUR UNE NOUVELLE PLATE-FORME DES DROITS DE L’HOMME ET DU CITOYEN

POUR LE DROIT À L’EXISTENCE comme valeur suprême et prioritaire contre les mythes "travaillistes" de l’efficacité et de la productivité du marché et de l’argent! Contre le néo-libéralisme!

Mais, simultanénement, contre toute tradition idéologique, dogmatique, fondamentaliste et millénariste. Il n’y a pas de rachat ou de solution définitive, d’ "Heure H" ou de science objective de l’avenir. Prophètes et Cassandre de tout acabit, le temps est fini: seul compte ce que le "mouvement réel" réussit à conquérir jour après jour, lieu après lieu, dans la matérialité du conflit.
"... La première condition de toute existence humaine et donc de toute histoire est que, pour pouvoir faire l’histoire, les hommes doivent être en mesure de vivre..." (K. Marx, L’Idéologie allemande).

CONTRE L’EUROPE DE MAASTRICHT, CONTRE LE NATIONALISME CENTRALISATEUR ET ETATIQUE, CONTRE TOUT NATIONALISME... POUR UN RESEAU DE COMMUNAUTÉS SOLIDAIRES.

Néo-libéralisme et globalisation capitaliste se fondent donc ensemble et fonctionnent au travers de mécanismes précis, bien définis: FMI, accords internationaux et politiques concrètes, comme le GATT, la NAFTA,...

En ce qui concerne la "globalisation européenne", l’horizon dans lequel nous nous trouvons immédiatement insérés, est sans aucun doute l’Europe de Maastricht, ainsi désignée et voulue par les puissants et par leurs factions.

Libre circulation des marchandises, de l’argent et des capitaux... voilà comment sonnent les vieux sons de cloches libéraux !

Simultanément, on voit surgir de nouvelles frontières et barrières pour des multitudes d’hommes et de femmes en exode, mais aussi la création de nouvelles et plus profondes hiérarchies, inégalités et descriminations, tout comme le démentellement de l’Etat-providence et l’annulation de tout droit et garantie au nom de la compatibilité économique et du marché. On voit aussi partout renaître de micros néo-ethno- nationalismes. Chaque "communauté territoriale homogène" lutte contre les autres pour trouver une place au soleil dans le marché politique et économique de la nouvelle Europe en laissant pour compte les pauvres et ceux qui sont dans une situation pire de la leur, en établissant de nouvelles frontières racistes et xénophobes, au nom de la propriété et de l’égoisme de la possession.

Et c’est donc dans ce scénario où il faut tenter de construire un nouveau sujet politique, conflictuel et antagoniste, ni parti, ni mouvement au sens classique du terme; un nouveau sujet politique - enraciné dans la dimension territoriale et locale et tourné vers l’horizon de la globalisation, de manière transversale, ouverte, articulée sur différents niveaux - en mesure de défendre les vieux droits conquis par les luttes portées par d’entières générations de travailleurs, mais ausi en mesure de resister au démentellement de l’Etat-providence, de la santé, de l’éducation, des services publics et simultanément en mesure de conquérir de nouveaux droits, au travers des actuelles contradictions entre revenu, travail, citoyenneté.

Mais l’énonciation de ces thèmes ne suffit pas : le Meeting Européen ne doit pas être pour nous un exercice dialectique ou un simple défilé de différents sujets et groupes politiques. Nous nous confronterons directement à l’expérience zapatiste et il s’agira d’indiquer des perspectives de lutte et de conflit, et notamment sur le problème des frontières; pour construire une première journée de dépassement matériel de diverses frontières en Europe à l’occasion de la signature du pacte de Shengen, fin octobre.

SUR CES POINTS NOUS VOUS INVITONS A VENISE POUR TROIS JOURNEES DE MUSIQUE, DISCUSSION ET INITIATIVES DE LUTTE LE 12-13-14 SEPTEMBRE 1997, meeting auquel participera une délégation du Commandement de l’EZLN, invitée officiellement par la Mairie de Venise

Associazione Ya Basta (Italie)

 

Ps : Toute personne ou groupe voulant participer à ces journées est prié de nous en informer avant le 5 septembre. Il sera possible de dormir au CSO Rivolta de Marghera - Mestre.


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